La puissance du Mazal – Quelle est la position de la Torah sur les loteries ?

 


La puissance du Mazal – Quelle est la position de la Torah sur les loteries ?


Le Choul’han Aroukh (Yoré Déa 179:1) interdit les loteries, en déclarant de manière catégorique : « Il ne faut pas interroger les astrologues ni tirer au sort. »
Cette décision repose sur les Tossafot (Chabbat 156a), qui affirment : « Les sorts et l’astrologie sont une seule et même chose. » La source semble être le Sifri (Dévarim), qui enseigne : « D’où savons-nous qu’on ne doit pas interroger par des lots ? Parce qu’il est dit : “Tu seras intègre avec Hachem ton Dieu.” » Ce verset semble également exhorter à ne pas s’en remettre au Mazal (destin, influence astrale), mais à faire confiance pleinement à Hachem.

Cependant, de nombreuses sources kabbalistiques permettent l’utilisation de Goralot (tirages au sort), qui ressemblent aux loteries mais sont faites de manière « cachère ». En général, on prend un livre saint, comme le ‘Houmach ou le Zohar, et on prie Hachem pour qu’Il envoie un message dans la page que l’on ouvre.

Le Gaon de Vilna (GRA) propose un processus plus détaillé, utilisé par Rav Aryeh Levin pour retrouver les noms de soldats juifs morts au combat afin de leur accorder une sépulture digne. Rav Aryeh ouvrait le ‘Houmach, tournait sept fois des pages, puis avançait à travers sept pages simples, sept colonnes, sept versets, sept mots, et enfin sept lettres. La septième lettre l’amenait à chercher un verset commençant par celle-ci, et ainsi il retrouvait des noms à attribuer aux soldats non identifiés.

On voit clairement que certaines « loteries » sont parfaitement admissibles. Alors, quelle est la différence ? Et comment comprendre l’interdiction des loteries dans la Torah ?

Un usage prestigieux dans la tradition

À première vue, l’interdiction du Choul’han Aroukh concernant les loteries paraît surprenante, surtout si l’on considère leur utilisation fréquente par les Juifs dans l’histoire.

Des pratiques anciennes, comme le rituel de Yom Kippour où le Cohen Gadol utilisait un tirage au sort pour désigner le destin des deux boucs, à la Mitsva d’attribuer la terre d’Israël par le sort (Bamidbar), les lots sont bien présents dans la tradition juive. On les retrouve également dans l’identification d’Akhan par Yéhochoua, l’usage de Shaoul pour révéler la faute de Yonathan, ou encore sa propre sélection comme roi à travers le sort.

Même le prophète Yona fut désigné par un tirage au sort sur le bateau, révélant son rôle dans la tempête. Dans Né’hémia, le sort déterminait qui offrirait le bois sur l’autel, ou encore qui vivrait à Jérusalem.

La Guemara évoque également les lots pour désigner les tâches des Cohanim ou répartir les héritages. Même les méchants, comme Haman ou Nabuchodonosor, utilisèrent le sort pour leurs projets.

Rav Chlomo Kluger explique que l’interdiction vise les tirages visant à prédire l’avenir, ce qui s’oppose à la foi totale en Hachem. Mais tirer au sort entre des options présentes est permis, comme dans le Temple.

Le Goral du Gaon de Vilna

Cette explication ne résout pas toutes les situations historiques, notamment celles où le sort fut utilisé pour découvrir des fautes ou guider des décisions majeures (ce qui semble relever de la prédiction du futur).

Le Goral HaGra illustre l’usage du sort, ou plutôt de signes divins, pour se diriger dans la vie. L’exemple de Rav Aharon Kotler, guidé par un verset du ‘Houmach pour son émigration aux États-Unis, montre que même prédire l’avenir peut être permis dans certaines conditions.

Le ‘Hassam Sofer et la paracha hebdomadaire, ou le nom du ‘Havot Yaïr, montrent que la tradition reconnaît que la Hachga’ha (providence divine) peut s’exprimer par le sort. Hachem peut se révéler à travers les lots.

On pourrait dire que la permissibilité dépend :

  • de l’usage de moyens cachères (comme le ‘Houmach ou le Zohar)

  • de l’intention sainte et du désir de se rapprocher d’Hachem

La différence essentielle réside dans l’intention : rechercher la volonté d’Hachem avec humilité et foi, et non chercher à contrôler ou prédire.

Le Birkei Yossef et le Chevet Moussar évoquent une version simplifiée du Goral HaGra : ouvrir un livre saint pour chercher un message dans le premier verset. Cela constitue une forme tangible de conseil divin, en harmonie avec l’idée que les Mitsvot sont appelées « E’tin » (conseils) dans le Zohar.

Cette pratique reflète une profonde Emouna en la Torah comme source vivante de guidance divine.

Le Mazal de la vie et de la mort

La question devient plus délicate lorsqu’il s’agit de déterminer la culpabilité ou de prendre des décisions de vie ou de mort par le sort.

Le Séfer ‘Hassidim permet le tirage au sort en cas de danger collectif, comme les marins avec Yona. Si des signes naturels indiquent clairement la colère divine, le sort peut servir à désigner la personne concernée.

Le Tiféret LéMoché va plus loin et autorise, dans un cas extrême, de désigner par tirage la personne à livrer à l’ennemi pour sauver le groupe. Mais ce n’est pas une position halakhique normative.

Le ‘Hazon Ich s’oppose à cela, notant que le sort dans l’histoire de Yona ne l’a pas condamné à mort, mais a seulement révélé le problème. C’est Yona lui-même qui a proposé d’être jeté à la mer.

Le Séfer ‘Hassidim lui-même se contredit : il s’oppose à l’usage de lots pour les cas de vie ou de mort, citant le principe Asmachta lo kanya, soulignant que les paris et tirages n’ont pas de valeur halakhique dans des cas aussi graves.

Il distingue entre les sorts anciens, effectués sous influence divine (comme le Ourim VéToummim) et ceux réalisés sans cette sainteté. Le Ourim VéToummim, utilisé par le Cohen Gadol, servait à obtenir des réponses directes d’Hachem. Ce type de sort est permis.

Le Séfer ‘Hassidim affirme qu’un tirage n’est valable que lorsqu’il est fait « devant Hachem », c’est-à-dire dans un cadre saint assurant la présence divine.

Cela montre une compréhension nuancée de l’interdiction des sorts pour prédire le futur, telle que définie par le Choul’han Aroukh. L’exception concerne les sorts qui reflètent une quête sincère de la volonté divine.

Appliqué au Goral HaGra, cela montre que ces pratiques, faites dans un esprit de soumission à la Torah, sont comparables à celles de l’époque du Beth Hamikdach. Elles ne transgressent pas la Mitsva de « tamim tiheyeh » (sois intègre avec ton Dieu), car elles ne cherchent pas à prédire, mais à se laisser guider par la Torah.

L’observation du Ralbag, affirmant que les sorts relèvent du Mazal dirigé par la providence divine, confirme cela.

Ainsi, ces pratiques, lorsqu’elles sont accomplies avec émouna et humilité, peuvent être vues comme une expression vivante de la guidance divine.

Puisse-t-on mériter d’atteindre tous ces niveaux.

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